Première publication dans McClure Magazine en juillet 1910
C’est en 1976 que les tensions entre la Chine et le monde atteignirent leur sommet. La commémoration du bicentenaire de l’indépendance des États-Unis en fut d’ailleurs ajournée. Beaucoup d’autres projets, dans d’autres pays, furent, pour cette même raison, bouleversés, reportés ou stoppés. Le monde prit brutalement conscience du danger, mais cela faisait plus de 70 ans que des événements demeurés inaperçus avaient abouti à un tel résultat
L’année 1904 marque le commencement logique de ce mouvement qui, 70 ans plus tard, plongera le monde dans la consternation. La guerre russo-japonaise eut lieu en 1904, et les historiens de l’époque remarquèrent d’un air grave qu’elle inaugurait l’entrée du Japon dans le concert des nations. Elle marquait en réalité l’éveil de la Chine. Cet éveil, longtemps attendu, avait cessé d’être espéré. Les nations occidentales avaient tenté de ranimer la Chine – en vain. Avec leur optimisme foncier et leur égocentrisme racial, elles en avaient conclu que la tâche était impossible, et que la Chine ne s’éveillerait jamais.
Mais ce qu’elles avaient oublié de prendre en considération, c’est qu’il n’y avait, entre elles et la Chine, aucune communauté de langage ou de psyché. Leurs mécanismes de pensée respectifs étaient radicalement différents. À peine l’esprit occidental pénétrait-il l’esprit chinois qu’il se retrouvait au beau milieu d’un dédale insondable ; l’esprit chinois, de son côté, au contact de l’esprit occidental, se heurtait à un mur de silence et d’incompréhension.
Tout cela était une question de langage. Il était impossible de transmettre des idées occidentales à un Chinois. La Chine y restait sourde.
Les progrès et les accomplissements matériels de l’Occident formaient pour elle un livre qui lui était fermé. Il y avait en effet, dans les tréfonds de la conscience et de l’esprit de la race anglophone, le don de vibrer au son de mots brefs d’origine saxonne ; et dans les profondeurs de la conscience chinoise, celui de vibrer pour ses propres hiéroglyphes. Mais l’esprit chinois restait indifférent au langage saxon, comme l’esprit anglophone aux hiéroglyphes. Faits d’une étoffe entièrement différente, ils étaient l’un à l’autre étrangers. Et c’est ainsi que les accomplissements et progrès matériels de l’Occident n’avaient pu troubler le profond sommeil de la Chine.
Puis il y eut le Japon, et sa victoire sur les Russes en 1904. Désormais, la race japonaise représentait un paradoxe monstrueux parmi les Orientaux. Curieusement, le Japon s’était montré ouvert à tout ce que l’Occident avait à offrir. Il avait rapidement assimilé les idées occidentales ; et il les avait digérées et appliquées avec tant d’efficacité qu’il était soudain apparu avec tout l’appareil d’une puissance mondiale. Il serait vain de vouloir expliquer cette ouverture singulière du Japon à la culture venue d’Occident
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