La science-fiction est toujours en avance d’un ou deux coups, comme aux échecs. Aussi a-t-elle tout envisagé, du meilleur au pire des mondes : l’écologie et ses nécessaires victoires, comme l’écologie et ses impasses périlleuses. Du danger du nucléaire à la suprématie des machines, en passant par le retour à la terre, la SF a ainsi toujours été, depuis plus d’un siècle, l’oracle, le gourou et la sirène de l’écologie politique.
PAR JÉRÔME LEROY
Il faut toujours faire confiance, en littérature, à ce qu’il est convenu d’appeler « les mauvais genres ». Le roman noir, par exemple, que l’on peut faire naître au sens moderne du terme, dans les années 20, rend compte de façon incroyablement précise de la profonde transformation de la société américaine à cette époque.
Il en va de même pour la science-fiction qui elle aussi, aux États-Unis, est d’abord née dans les pulps. Elle se révèle un sismographe parfait des fantasmes, des peurs et même des névroses de tout un continent. C’est d’ailleurs dans un de ces magazines : Science Wonder stories, que le terme même de « science-fiction » apparaît en tant que tel, là aussi en 1929, comme si les problèmes apportés par une société de plus en plus angoissante trouvaient d’abord un écho dans ces petits fascicules de consommation courante, dont la première mission était pourtant de distraire l’homme de la rue, aussi bien en le faisant rêver avec des voyages intersidéraux qu’en l’épouvantant avec des extraterrestres abjects qui ressemblaient terriblement à ces enfoirés de nazis puis à ces salopards de soviétiques.
Néanmoins, la science-fiction dans ces années-là est un genre plus ambigu politiquement que le roman noir, qui reste essentiellement progressiste comme en témoignera le séjour en prison, au moment du maccarthysme, de Dashiell Hammett, soupçonné de sympathies communistes. La science-fiction se révèle une littérature beaucoup moins critique socialement. Elle est à la fois persuadée du bien-fondé absolu de la science et, politiquement, oscille entre le conservatisme et le libertarisme, cet anarcho-capitalisme typiquement US dont Clint Eastwood est aujourd’hui l’un des représentants les plus connus. Un des grands auteurs libertariens de la SF est Robert A. Heinlein (1907-1988). Dans Révolte sur la Lune (1967), il peint le conflit entre une Lune utopique débarrassée des idéologies rétrogrades et la Terre qui vit sous le joug conjugué d’une Amérique fascisante et d’une Eurasie stalinienne. La Lune est
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