Pierre Méhaignerie: « Il faudrait avoir l’audace de casser les partis actuels »

Trois fois ministre, élu sans discontinuer à l’Assemblée de 1973 à 2012, Pierre Méhaignerie a été le trait d’union entre Lecanuet et Bayrou à la tête du CDS. Mais lui n’a jamais rêvé de l’Élysée. Profondément modéré, il a claqué la porte de l’UMP en 2012 et porte un regard acéré sur les barons de la droite et du centre.

PROPOS RECUEILLIS PAR JEAN-BAPTISTE DAOULAS
PORTRAITS YANNICK LABROUSSE

Le 20 novembre 2012, un communiqué de presse annonce que vous quittez l’UMP, que vous avez cofondée dix ans plus tôt, pour rejoindre l’UDI. Pourquoi ?

Il y avait déjà eu un malaise après le discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy, ainsi que sur certaines orientations comme la baisse des effectifs des enseignants à l’école primaire. Et puis, le choc pour moi a été le résultat du combat Fillon-Copé – de mon point de vue, les élections internes avaient été truquées −, j’étais alors à un petit-déjeuner chez Simone et Antoine Veil, avec Jean-Louis Bourlanges. Les trois m’ont dit : « Pierre, tu ne peux pas rester. » Ils avaient accompagné mon engagement au CDS (Centre des démocrates sociaux, présidé de 1982 à 1994 par Pierre Méhaignerie – NDLR) et j’avais beaucoup d’affinités avec Simone Veil. Nous avons donc rédigé un communiqué ensemble disant que je quittais l’UMP. Il était difficile pour moi de quitter nombre de mes collègues députés avec lesquels j’avais travaillé en bonne entente pendant dix ans comme président de la commission des Finances, puis de la commission des Affaires sociales. Beaucoup partageaient la même analyse que moi.

Est-ce que vous avez eu des discussions avec eux pour leur proposer de partir avec vous ?

Non, j’estime que c’était un choix personnel. Mon espoir était d’en voir quelques-uns partir. Mais je comprenais très bien que, venant d’être élus, c’était difficile pour beaucoup d’entre eux vis-à-vis de leurs militants. Seul Michel Piron est venu. D’autres me disaient : « Je partage, Pierre. Mais je vais attendre, je vais voir. » Il faut dire aussi que l’UDI ne dégage pas de leaders… et qu’il y a parfois trop de batailles d’ego !

Comme au temps de l’UDF. En 2002, quand vous prenez la décision de quitter l’UDF pour partir fonder l’UMP, vous déclarez dans Le Monde : « Je pense que notre influence comptera davantage à l’intérieur d’une grande formation de centre droit, plutôt que de se retrouver seul dans son coin. » Dix ans plus tard, est-ce que ce pari a été perdu ?

Ce pari aurait pu être tout à fait gagné. Cela dépendait du ou des leaders. En 2002, les deux tiers de l’UDF sont partis pour l’UMP pour deux raisons. La première a trait à la cassure psychologique avec François Bayrou, qui faisait suite à l’élection de Charles Millon en Rhône-Alpes après son alliance avec le Front national en 1998. On aurait pu discuter de l’exclure. Mais ce qu’avec beaucoup d’autres je n’ai pas accepté, c’est que François le décide tout seul, fasse une conférence de presse avec Marielle de Sarnez, puis vienne seulement ensuite nous l’annoncer en bureau politique. Je lui ai dit : « C’est quand même une décision lourde. Je

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