2017 – Les pouvoirs de l’imagination : Le Menhir par Arnaud Viviant

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Sandra déboule dans mon bureau.

– Le Menhir a disparu !

Nous sommes le 27 avril 2017. Trois jours après le premier round de l’élection présidentielle qui a vu Marine Le Pen et François Hollande se qualifier pour le second. À droite, après la palinodie des primaires de 2016 où Juppé et Sarkozy avaient réalisé le même score à quelques centaines de voix près, si bien que l’un et l’autre avaient finalement décidé de se présenter, on s’était évidemment bouffé le nez, puis annihilé. Sarkozy avait fait 15 % et Juppé seulement 11,3 %.

– Bonjour Obélix ! Alors d’abord, on frappe à la porte et puis on dit : « Salut Astérix, ô mon rédacteur en chef bien-aimé. »

– Arrête de déconner, Franck, c’est grave : il a vraiment disparu.

– Qui ça ?

– Jean-Marie Le Pen.

J’avais complètement perdu de vue qu’on surnommait Le Pen le Menhir. Mythologie à la con. J’avoue que je me suis demandé à ce moment-là si Sandra ne suivait pas depuis trop longtemps le FN pour se mettre à parler de la sorte. Pourtant, j’avais confiance en elle. À 27 ans, c’était déjà une grande journaliste. De la trempe d’une Raphaëlle Bacqué, d’une Ariane Chemin. Je n’oubliais pas que c’était elle qui avait sorti fin 2015 l’affaire dite du Monopoly qui avait mis un terme définitif à la carrière politique de Jean-François Copé.

– Comment tu sais, demandais-je.

Sandra (long visage cerné de cheveux sages, grande bouche lippue, nez aquilin, yeux de biche légèrement en amande, un vrai Modigliani. J’avais l’âge d’être son père, et j’y songeais parfois) :

– J’ai un bon copain à BFMTV. Normalement, Le Pen doit faire Bourdin après-demain. Seulement voilà : depuis dimanche soir, moment où il quitte son QG de campagne avec son chauffeur et ses deux gardes du corps, il s’est évaporé dans la nature. Personne ne sait où il est.

– Le vieux se la joue Baden-Baden…

– Quoi ?

– Mai 68, de Gaulle disparaît pendant trois jours. Personne ne sait où il crèche, même pas Georges Pompidou, son premier ministre. On apprendra plus tard qu’il se trouvait à Baden-Baden, auprès du général Massu. Tu as parlé avec des gens du FN ?

– J’ai eu Philippot en direct. En off, il a bien voulu me confirmer la disparition. Il m’a aussi confié que Marine était pétée de trouille. Elle craint que son père lui joue un énième tour de cochon pour foutre en l’air ses chances contre Hollande.

Il faut dire que depuis deux ans les relations de la fille et du père étaient à hue et à dia. Tout avait commencé en avril 2015, après le succès aux départementales du Front national, lorsque Jean-Marie Le Pen

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