Étudiant en droit, Joseph d’Aragon a 26 ans lorsqu’il rencontre Jean-Edern Hallier par hasard à Paris, début 1984. C’est l’année où l’écrivain polémiste, en guerre contre François Mitterrand, devient la cible principale de l’Élysée. Pour Joseph d’Aragon, un roman policier commence.
PAR EMMANUEL FANSTEN
C’était en février 1984, peut être en mars. Ce soir-là, il est environ 22 heures lorsque Joseph d’Aragon franchit la porte du Vieux Comptoir, un restaurant de la rue de Birague, juste derrière la place des Vosges. Gueule d’ange sous ses cheveux hirsutes, le jeune homme vient à peine de débarquer à Paris avec Jean Pinquié, un de ses vieux copains d’enfance. Les deux amis sont partis la veille de Toulouse dans une vieille Renault 5. Dix heures de route d’une traite, sans autre but que de passer quelques jours à Paris. À 26 ans, Joseph ne connaît pas la capitale, qu’il a quittée enfant, et encore moins le petit milieu parisien. « Nous avions le vague projet d’interviewer un peintre pour une revue à laquelle Jean collaborait », se souvient-il aujourd’hui. Près de trente ans plus tard, Joseph nous reçoit dans sa petite maison de Gentilly, où il vit avec sa femme et sa dernière fille, Jeanne, 10 ans. Ses deux autres filles, Camille et Julie, sont déjà trentenaires. Plusieurs fois, elles ont entendu parler de ces quelques mois qui ont suivi l’arrivée de leur père à Paris. Mais jamais dans les détails. De cette période, la plus trouble de sa vie, Joseph n’a pas conservé grand-chose. Tout tient dans une petite boîte métallique, qu’il mettra près de deux heures à retrouver au milieu du fatras et des livres entassés dans sa cave. À l’intérieur : six photos aux bords jaunis, une coupure de presse, quelques lettres griffonnées à l’encre bleue et une facture téléphonique au nom de Jean-Edern Hallier.
Pour Joseph, le premier épisode a donc lieu au Vieux Comptoir. En 1984, Jean-Edern Hallier vient régulièrement y dîner en voisin. Installé dans un vaste appartement donnant sur la place des Vosges, l’écrivain est alors une figure de l’époque, surtout connu du grand public pour ses provocations et ses frasques insensées sur le plateau d’« Apostrophes ». Quelques mois plus tôt, il est allé jusqu’à mettre en scène son propre enlèvement pour attirer l’attention des médias. Toujours entouré d’une noria de jeunes gens fascinés, il est resté très
Vous voulez lire la suite ?
Profitez de tous les articles de Charles en illimité !
Inscrivez-vous et bénéficiez de 8 semaines d’essai gratuit sans aucun engagement.
Recevez chaque semaine Charles l'hebdo
Acheter l'article
pour 3€
Tout Charles en illimité
L’hebdo, les podcasts, le site
Dès 6€ / mois
Vous avez déjà un compte ? Identifiez-vous