Les masques de la plume

Henri Guaino écrivait les discours de Nicolas Sarkozy, Aquilino Morelle peaufine ceux de François Hollande. Seules les plumes des présidents de la République ont des noms familiers. Pourtant, bien d’autres travaillent aux côtés de ministres ou de grands élus locaux. Inconnus de tous et pourtant précieux, ils sont au cœur de la fabrication de la parole politique.

PAR BAPTISTE BOUTHIER
PORTRAITS PATRICE NORMAND
ILLUSTRATION ISAAC BONAN

En se rasant, beaucoup pensent à devenir président de la République ou Premier ministre. Assez peu, il faut bien l’avouer, se rêvent en plumes. Scribe de pharaon, une vocation ? Le cliché ne résiste pas bien longtemps lorsque l’on interroge les quelques rares spécimens français – difficile de les recenser tous, mais ils s’autoévaluent à une centaine, guère plus. Les uns ont fait Normale Sup’ ou un Institut d’Études Politiques, les autres n’étaient que de simples militants, mais a ucun ne rêvait vraiment de ce destin. La fonction « plume » les attirait parfois. Mais elle résonnait comme un mirage, un rôle que l’on fantasme plus qu’on ne le connaît, dans la logique d’une existence qui se veut dans l’ombre. En anglais, plume se dit d’ailleurs « ghost writer ».

La première fois que Pierre -Jean Le Mauff est entré dans le bureau d’une plume, il s’est dit : « C’est le boulot de mes rêves. » « Alors que je n’avais aucune idée de ce en quoi ça consistait », précise-til aussitôt. C’était en mars 2010, au cabinet de Dominique Bussereau, alors secrétaire d’ État aux Transports. Pierre-Jean Le Mauff n’est qu’un étudiant de 22 ans qui, pour valider son master en Communication politique au CELSA, commence un stage de six mois comme « petite main ». « C’était par pure curiosité. Ça m’intéressait beaucoup, parce que c’est là que se prennent les décisions, mais je n’avais pas particulièrement envie de travailler en cabinet. Je me disais : ça va durer six mois, et après je ferai autre chose. » Mais au bout d’un mois et demi à peine, le « conseiller discours » – étiquette officielle de la plume – de Dominique Bussereau est « appelé ailleurs ». Entre temps, le jeune stagiaire a su se faire remarquer. « Le conseiller discours est venu me voir pour me dire qu’il avait proposé que ce soit moi qui le remplace. » Pendant sept mois, il va être la plume de Dominique Bussereau.

Une exception ? Pas vraiment. Quand Baptiste

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