Jean-François Copé : « Je crois en Dieu »

Jean-François Copé ne met jamais sa judaïté en avant. Il est au demeurant plus pudique pour parler de la religion juive que pour évoquer les églises et les cathédrales de France dans lesquelles il aime se réfugier. S’il ne renie rien de ses origines, ashkénaze du côté de son père, séfarade par sa mère, le maire de Meaux rappelle l’importance de la laïcité en France et lève le voile sur ses convictions religieuses. Interview par Astrid de Villaines. Photo Samuel Guigues. 

Vous souvenez-vous d’un moment précis de votre enfance où vous prenez conscience que vous avez une religion ?
Non. Pour une raison très simple qui a trait à l’histoire de ma famille. Je n’ai jamais reçu d’éducation religieuse. La première image de la religion que j’ai eue était une image de mort, celle de la Shoah et de la déportation. Dès mon enfance, c’est quelque chose que j’ai perçu de manière extrêmement violente. Ensuite, quand je suis devenu adolescent, je suis entré dans une construction morale et intellectuelle plus approfondie de la question religieuse et j’ai fait moi-même le choix de ne pas être religieux.

Vous avez des origines diverses, la Roumanie du côté de votre père, l’Algérie du côté de votre mère. Quel rapport entretenez-vous avec ces cultures ?
Vous savez, je suis né à Paris, j’ai grandi à Paris, je suis engagé depuis plus de vingt ans à Meaux et dans le nord de la Seine-et-Marne. Ma vie, ma culture, mon identité, c’est avant tout d’être Français. La Roumanie, dont on m’a parlé, date des années 1920 et l’Algérie des années 1950. Je connais ces cultures, mais ce ne sont pas les miennes.

Ce n’est pas non plus un rejet ?
Pas du tout, mais ce n’est pas la même chose de les connaître par le seul récit de ses parents et grands-parents.

Êtes-vous déjà allé sur la trace de vos ancêtres ?
Non, jamais. Je suis allé une fois en Roumanie, en visite officielle, comme ministre. En Algérie, aussi, pour une visite officielle. J’ai eu une conversation passionnante avec Abdelaziz Bouteflika pendant deux heures. Il est une mémoire vivante. Il connaissait ma famille. Mon grand-père était un avocat assez connu à Alger. Il m’en a parlé.

Qu’est-ce que cela a changé pour vous d’avoir un grand père qui a francisé son nom de famille de Copelovici à Copé ?
Pour moi, rien. Pour lui, en revanche, c’était le symbole de l’assimilation par la naturalisation. C’était en 1926 !

Qu’aimez-vous dans la culture juive ?
Il y a quelque chose de très touchant et très fort : l’attachement à la tradition, à l’histoire, la culture, la musique, l’humour, les accents., le côté « traversée du monde » et donc « ouverture », mais il y a la Shoah, qui reste pour moi quelque chose d’incompréhensible.

Vous avez l’impression qu’on oublie ?
Il ne faut rien lâcher là-dessus.

Trouvez-vous qu’il y a une sorte d’indifférence quand les attentats en France concernent des Juifs ?
Le vrai problème c’est l’identification. En 2012, lorsque Merah a commis ses crimes atroces, les Fran-çais ont été bouleversés, mais beaucoup se sont dits : « Cela ne risque pas de m’arriver, je ne suis pas juif. » Puis il y a eu Charlie et le Bataclan et tout le monde a compris que, si, cela peut arriver à tout le monde.

Comment interprétez-vous la fameuse phrase de Raymond Barre en 1980 : « C’est un attentat odieux qui voulait frapper des israélites qui se rendaient à la synagogue et qui a frappé des Français innocents. »
Comme une immense gaffe politique. Et sans doute le reflet d’un état d’esprit.

Cela ne traduit-il pas une fracture entre les Juifs et une partie de la population française ?
Il y aura toujours des antisémites, bien sûr. Quand on lit les propos des années 1930, on mesure que l’antisémitisme était d’une violence extrême, revendiquée, théorisée, pire encore que ce qu’il se passe aujourd’hui. C’est effrayant. Mais la France, c’est aussi le pays qui a condamné son état-major pour réhabiliter l’honneur d’un petit capitaine juif, Alfred Dreyfus. Devant les yeux ébahis de toute l’Europe !

On entend toujours en France des propos antisémites, notamment dans certaines manifestations…
Il y en a toujours eu. La question, c’est de savoir ce que cela a comme incidence sur la place de

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