Jean-Christophe Lagarde: « Notre famille politique a perdu l’habitude de vouloir exercer le pouvoir »

Jean-Christophe Lagarde, maire de Drancy et député de Seine-Saint-Denis tente de contenir l’unité de la famille centriste au sein de l’UDI, parti qu’il dirige depuis novembre 2014. Celui qui confie avoir refusé à deux reprises d’être ministre veut affirmer son autorité et son indépendance d’esprit. Il revient pour Charles sur les difficultés du centre et les relations à géométrie variable avec la droite. Et se montre impitoyable à l’égard de ses pairs.

PROPOS RECUEILLIS PAR MATHILDE SIRAUD
PORTRAITS JULIE ROCHEREAU

Vous êtes petit-fils de militant communiste, maire d’un ancien bastion PCF, Drancy, est-ce que cet héritage a joué un rôle dans votre parcours politique ?

J’étais moi-même déjà engagé quand j’ai appris que mon grand-père avait été militant communiste. Il a cessé d’adhérer quand il a compris que cette machine fonctionnait plus pour la satisfaction des dirigeants que pour les gens qu’elle était censée défendre. Vivre dans une ville communiste a sans doute joué un rôle dans ma répulsion à refuser d’écouter l’autre. Le communisme est un enfermement intellectuel où, dans la dialectique utilisée, on refuse d’entendre ce que l’autre a à dire et la façon dont il pense. C’est une espèce de mécanique implacable qui apporte toujours les mêmes réponses, dans le même sens, sans prendre en comptes les évolutions. Je trouvais cette approche de la politique caricaturale.

À 16 ans, vous envoyez une lettre à Raymond Barre, ancien Premier ministre. Qu’est-ce que vous souhaitiez lui adresser comme message ?

Raymond Barre est le seul qui me semblait à la fois responsable et réaliste, après la défaite de Valéry Giscard d’Estaing. Mitterrand et le nouveau gouvernement s’étaient lancés dans une politique qui voulait changer la vie des gens en niant toutes formes de réalités de la vie. Barre disait des choses censées, sans les excès de Chirac qui était à l’époque anti-européen et de plus en plus libéral. Barre était quelqu’un qui affirmait avec détermination qu’on ne pouvait pas distribuer plus de richesses qu’on en produisait – c’était alors le début de l’endettement de la France dont on paye les conséquences aujourd’hui – et en même temps que l’objectif de l’économie était de créer de la richesse. Je ne me rappelle plus ce que je lui ai écrit, mais j’avais lu son livre Réflexions pour demain, publié en 1984. J’ai rejoint ensuite le Réseau réel, pour contribuer à préparer l’élection présidentielle de 1988.

Vous êtes, depuis 2014, président de l’UDI. Vous faites partie de cette famille centriste, cet espace politique assez obscur, souvent caricaturé. Quelle est votre définition du centre ?

C’est le refus de concevoir des réponses politiques avec des a priori. Le seul a priori chez un centriste, c’est : « Je ne vais pas répondre à la question en fonction de la personne qui me la pose, je vais le faire en fonction du problème lui-même ». Ce n’est pas un mode de lecture automatique. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de corpus et de ligne, mais que les choses sont adaptables. C’est une grande prise en compte de la réalité, de ce qu’on voudrait que le monde soit. Contrairement à ce que les gens pensent, ce n’est pas un peu de droite et un peu de gauche. Le centrisme est basé sur deux valeurs : le fédéralisme et l’humanisme. Le fédéralisme considère que la construction sociale fonctionne mieux de façon ascendante. En partant d’un ensemble réduit qui s’associe dans un ensemble plus grand. C’est la commune qui a besoin d’une

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